Le LIDAR au service de l’archéologie
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- Publié le mercredi 19 septembre 2018 11:28
Lorsque nous voyageons, nous recherchons une expérience extraordinaire. La fascination des pays lointains tient dans des paysages exotiques, des coutumes mystérieuses et des vestiges des grandes civilisations disparues. Les sites historiques comme Angkor Wat, Machu Picchu et Tikal sont de véritables attractions touristiques d’autant que tous les secrets du passé n’ont pas encore été entièrement dévoilés. A présent, la technologie laser fournit aux archéologues des informations qu’ils ignoraient auparavant. Tout récemment, les nouvelles découvertes sur la civilisation Maya ont bouleversé nos connaissances.
Nouvelles perspectives sur les anciennes cultures
Le Mexique et l’Amérique centrale sont des destinations touristiques de plus en plus prisées. Les foules ne sont pas seulement attirées par les plages d’Acapulco et de Cancun, les anciens sites résidentiels et culturels des grandes civilisations précolombiennes attirent aussi dans la région des millions de visiteurs par an. Les plus connus sont les Aztèques qui ont régné dans les grandes régions centrales du Mexique à l’époque des conquistadores espagnols. En général, on connaît beaucoup de choses sur la culture aztèque, quoique la plupart du savoir représente le point de vue des conquérants. La civilisation Maya, qui a habité les montagnes densément boisées et les plaines de ce qu’on appelle aujourd’hui le Mexique, Guatemala, Belize, El Salvador et Honduras, nous semble beaucoup plus mystérieuse. Contrairement aux Aztèques, leur apogée était révolue lorsque les premiers Européens sont arrivés dans la région. Tout ce qu’on connaît aujourd’hui a été laborieusement rassemblé par les archéologues et les anthropologues pendant les 150 dernières années à partir des vestiges des cités abandonnées il y a longtemps. Ce n’est pas étonnant que chaque découverte offre une nouvelle perspective du peuple Maya.
Forêt tropicale impénétrable
Tout le monde a vu les photos des temples et pyramides de Tikal. Mais si vous ne l’avez pas encore visité, il est difficile de s’imaginer la grandeur des ruines. Le parc national qui les abrite s’étend sur une surface de 575 km2. La plupart est couverte par une forêt tropicale dense. Par rapport à la réserve de biosphère Maya environnante, ceci est tout simplement minuscule. L’immense réserve naturelle au nord de la province Petén s’étend sur 21,000 km2. Avec les biosphères limitrophes au Mexique et Belize, elle forme une forêt tropicale impénétrable et protégée ayant les dimensions de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.
On a longtemps pensé que la végétation dense cachait d’autres vestiges de la civilisation Maya, mais il a été difficile de les chercher. A l’époque d’Indiana Jones, lorsque les chercheurs trouvaient leur chemin dans les broussailles à l’aide d’une machette, c’était souvent par pur hasard qu’ils trouvaient les anciens sites. Beaucoup de ruines sont passées inaperçues parce que l’expédition les a ratés de quelques centaines de mètres seulement. Bien entendu, des méthodes plus avancées existent depuis longtemps : par exemple, les photos aériennes. Toutefois, même ces photos de la région ne trahissent guère plus que les cimes denses des arbres. C’est grâce à l’application de la technologie laser qu’on a pu pénétrer les arbres.
Mesures aériennes complexes
La technologie LIDAR (détection et télémétrie par laser) utilise le rayonnement laser pour mesurer la distance. Lorsque l’impulsion laser rencontre un obstacle, la lumière réfléchie est captée par un détecteur. On peut calculer la distance exacte jusqu’à l’obstacle à partir du moment de l’émission de l’impulsion jusqu’à l’arrivée de la lumière réfléchie, ou ce qu’on appelle temps de vol (TOF) en jargon technique. Ce principe est connu par tous les passionnés du bricolage qui ont déjà mesuré leur maison à l’aide d’un télémètre optique. Cette technologie est aussi utilisée dans la détection des obstacles pendant la conduite autonome ou avec les drones autonomes (Photonics News, no 27, pages 4-8). La haute résolution est un des plus grands avantages de la technologie LIDAR : par rapport à d’autres technologies, les systèmes laser fonctionnent sur de très courtes longueurs d’onde et peuvent ainsi enregistrer considérablement plus de détails.
Pour créer un modèle numérique du terrain, le laser numérise les paysages depuis un avion ou un hélicoptère. Des milliers d’impulsions sont émises par seconde. Outre le LIDAR, deux autres technologies sont utilisées pour identifier avec précision le relevé numérique de terrain : une localisation GPS assistée par satellite enregistre sans cesse la position géographique exacte de l’aéronef pour que les mesures LIDAR puissent être localisées ultérieurement sur la carte. Ceci est réalisé en 3D puisque l’altitude de vol exacte a évidemment une influence cruciale sur les résultats de TOF. De plus, une centrale à inertie – essentiellement un gyroscope – mesure les différents angles d’inclination de l’aéronef puisque ceux-ci influencent directement la longueur du parcours du faisceau laser reflété.
On se passe des arbres
Un effet particulièrement utile en cartographie numérique se situe au niveau des arbres et des plantes. Contrairement aux bâtiments ou aux rochers, les feuilles ne reflètent pas toute la lumière. Une partie pénètre la feuille et continue à s’infiltrer vers la terre jusqu’à rencontrer le prochain « obstacle » et ainsi de suite. Ainsi, il peut arriver que la même impulsion lumineuse soit reflétée plusieurs fois – chaque fois avec moins d’intensité et, bien entendu, avec des résultats de TOF croissants. Tous les signaux réfléchis sont ensuite assignés à la première impulsion. Le résultat est une image tridimensionnelle de l’arbre – ou même de toute la forêt.
A l’aide d’algorithmes complexes, un ordinateur peut virtuellement éliminer la végétation du modèle cartographique identifié. Il en reste un modèle détaillé du terrain nu. Les chercheurs de vestiges Maya étaient étonnés de découvrir à quel point les données LIDAR leurs étaient utiles. Les structures de surface indiquaient qu’il y avait des maisons, des routes et des champs il y a des siècles à l’endroit de la forêt tropicale. Tout récemment, on pensait que l’arrière-pays des cités Mayas était à peine peuplé. A présent, les archéologues en savent plus sur le sujet : les métropoles étaient étroitement liées.
De nouvelles découvertes partout
La technologie laser offre des nouvelles perspectives sur le passé non seulement en Amérique centrale. En Europe, à Glauberg (Hesse) par exemple, les archéologues pensaient avoir déjà découvert toutes les traces historiques des peuplements millénaires. Les recherches LIDAR ont démontré le contraire : il y avait une douzaine de sites potentiels. Environ la moitié d’entre eux ont déjà été examinés et la plupart sont des tumuli. Leurs collègues au Guatemala sont encore loin d’en être là. Ils doivent d’abord évaluer et analyser toutes les données. Cela s’annonce très intéressant !
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