Un laser aléatoire à atomes froids

Des physiciens niçois viennent de réaliser un laser sans miroir dans un nuage d’atomes froids. Ils envisagent d’utiliser ce premier « laser aléatoire » utilisant une vapeur atomique pour élucider le rôle de la diffusion dans l’émission dans les lasers naturels observés en astrophysique dans des gaz stellaires ou des atmosphères planétaires.

Dans un laser, le système optique fait passer et repasser la lumière un très grand nombre de fois au travers d’un milieu qui amplifie son amplitude jusqu’à produire un faisceau très intense et concentré. Dans certaines situations, lorsque la diffusion au sein du milieu amplificateur est très importante, l’émission laser peut se produire même sans système optique extérieur, on parle alors de laser aléatoire. La compréhension de ces systèmes est actuellement difficile, car il s’agit soit des systèmes observés en astrophysique, soit des systèmes photoniques fonctionnant en impulsion. Pour ces derniers il est difficile de caractériser finement les propriétés du milieu amplificateur et diffusant. Des physiciens de l’Institut Non Linéaire de Nice - INLN (CNRS / Université de Nice Sophia-Antipolis) viennent pour la première fois de réaliser un laser aléatoire qui fonctionne en continu dans un nuage d’atomes froids, un milieu dont les propriétés sont facilement accessibles. La possibilité de contrôler les paramètres expérimentaux et de modéliser finement ce système à l’échelle microscopique en fait un outil de choix pour tester les différentes approches théoriques et pour mieux comprendre les lasers aléatoires astrophysiques. Ce résultat est publié dans la revue Nature Physics.

Réaliser un laser aléatoire nécessite de combiner dans un même milieu l’amplification de la lumière et une diffusion efficace. Dans un nuage atomique, ces deux rôles doivent être joués par les mêmes atomes ce qui ne va pas de soi, car en général, ces deux phénomènes se produisent à des fréquences différentes. Pour surmonter cet obstacle, les chercheurs ont utilisé la richesse de la structure électronique de l’atome de rubidium. L’amplification est obtenue grâce au mécanisme dit « de transition Raman stimulée ». Les physiciens ont mis à profit le fait que cette transition est en partie accordable pour faire coïncider la fréquence de l’amplification avec la fréquence d’une autre transition atomique, qui produit de la diffusion sans être perturbée par le laser intense. Un second laser, accordé sur une transition encore différente, contrôle les niveaux des populations atomiques et stabilise le niveau d’amplification à un niveau constant, ce qui permet une émission laser quasi-continue. L’apparition du fonctionnement en laser aléatoire se traduit par l’augmentation de la fluorescence du nuage atomique lorsque son épaisseur optique augmente, c’est-à-dire lorsque le nombre d’atomes est suffisant pour que la rétroaction par diffusion devienne significative. Comme prédit pour un laser aléatoire, cette augmentation atteint un seuil avec la taille de l’échantillon.

Source : Institut de physique du CNRS